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    JEUDI 25 NOVEMBRE 2010, A 13:02
    PREMIERS FRIMAS
     

     

     

    Hier, pourtant, c'était l'été !

    Aujourd'hui, ce matin, cette nuit même,

    Un vent coléreux s'est échappé

    Des steppes stériles, des montagnes sévères.

    Il vient d'on ne sait où , là-bas, au bout du monde,

    De la Bretagne grise où finit le beau temps.

     

    Mon beau jardin se tord et geint

    Et les feuilles roidissent, noircissent et tombent,

    Et les sépales pâles de mes derniers rosiers

    Se rouillent de douleur sous la pique du froid.

    Mes dahlias attristés agonisent et se cassent

    Et se crispent de peur les boutons d'hortensias.

     

    Est-ce déjà l'hiver qui vient à petits pas,

    Et les fêtes gourmandes qu'on attendra en vain ?

    J'ai peur de l'heure qui vient et des heures d'hiver

    Qui m'emprisonnent, me désolent et tiédissent mon pas.

    Qu'il est loin le soleil, et la brise légère sur mon visage ouvert,

    Qu'il est loin mon bonheur au cœur de mon jardin !

     

     

     

    MERCREDI 24 NOVEMBRE 2010, A 20:22
    INVITATION
     

     

     

    Viens chez moi pour un café,

    Viens chez moi te reposer :

    Chaque soir, la soupe est prête,

    On crie tous à qui mieux mieux,

    Viens chez moi pour faire la fête,

    Viens chez moi pour rire un peu.

     

    Je sers le vin au pichet,

    Mais on le boira longtemps.

    Ma cuisine est enfumée,

    Et la nappe est en papier,

    Il n'y a pas d'ortolans

    Mais on chantera gaiement.

     

    On est sur des tabourets,

    Parfois même on est debout,

    Viens chez moi, la table est prête

    Viens chez moi car c'est chez nous.

    Viens chez moi pour bavarder,

    Viens chez moi pour l'amitié.

     

     

    MERCREDI 17 NOVEMBRE 2010, A 20:19
    NÉANT
     

     

    La terre est plate

    Et bordée de néant :

    J'ai peur de mes lacunes et de ma viduité

    Et de la brume sur mes pensées.

     

    La terre bascule et je crains de sombrer :

    Il faut à mes pieds trop légers

    Chausses de plomb

    Et non sandales de papier.

     

    Et tourne la terre

    En une danse folle :

    Valse de l'Ange en démence,

    Vertige étrange dans l'ombre immense.

     

    Je tourne sur moi-même,

    Petit derviche articulé,

    Tiré par des ficelles

    Que je ne peux couper.

     

     

    LUNDI 15 NOVEMBRE 2010, A 09:13
    DESPERATE OUTWIFE
     

     

     

    Assise au bord de l'eau

    Je pleure ma vie

    Où les trésors se pétrifient.

    Boue et miasmes,

    C'est le regard d'autrui.

     

    En moi coule, transparente et vive

    Une eau domptée par les fouets du devoir,

    Et la source cachée sourd au fond de mes os.

     

    Cent fois, j'avale l'eau croupie du quotidien,

    Et bête sous le joug,

    Et machine imbécile,

    M'enfonce jusqu'au cœur dans le gris du travail.

     

    M'attend le papier blanc,

    M'attend la toile blanche.

     

    Autour de moi dansent les papillons de ville

    Qui font la fête, rient, battent des ailes :

    Mon pas pesant se traîne

    Désespérément sur une vie stupide.

    Je hais  chefs et chefaillons,

    Mandarins et tyranneaux,

     Voisins, amis, familles

    Qui me bouffent et me méprisent,

    Attendent des miracles de mon sac à poussière,

    Ferment à toute volée mon échappée timide,

    Mes tentatives vaines et légères

    Pour retrouver quelques instants volés 

     

    Ma pauvre toile blanche,

    Mon pauvre papier blanc.

     

    L'horreur est dans le quotidien,

    Les chaussettes à laver et le poulet au four.

    Mes poumons respirent avec le fumet du lapin,

    Mon cœur bat au rythme du lave-linge,

    Mon sang coule avec la serpillière,

    Et mon balai énervé

    Balaie aussi tout génie

    Qui crépite avec les frites

    Et pue de fatigue abrutie.

     

    Le miroir au matin n'a pas de pitié :

    J'y vois la gorgone en furie,

    Echevelée et folle,

    Les yeux exorbités de rêves interrompus.

    Et quand je souris à mon image hâve

    Apparaît, facétieux, le sourire d'E.T.

     

    Je suis prisonnière des tâches domestiques,

    Des leçons récitées et de l'aspirateur,

    Des dossiers à remettre et du patron boudeur.

    Le bagne quotidien me transforme en sorcière

    Et me fait patauger dans l'horreur absolue.

     

    Mon petit papier blanc,

    Ma toile immaculée !

     

    Il ne s'agit pour l'heure

    Ni de vent frais, ni de rosiers en fleurs,

    Ni de lecture, ni d'écriture, ni de peinture :

    Le poème écrasé suinte comme la vie elle-même,

    Laide et puante.

     

     

     

     

     

     

     

    JEUDI 11 NOVEMBRE 2010, A 11:10
    L'AMOUR NIGAUD
     

     

    J'aime ton amour…

    C'est un peu bêta, dit Nicolas.

    Mais pourquoi l'érable

    N'aimerait-il pas

    La sève qui le nourrit ?

     

    J'aime ton amour…

    C'est un peu facile, a dit Basile,

    Mais pourquoi la fleur

    N'aimerait-elle pas

    Le soleil qui l'épanouit ?

     

    J'aime ton amour…

    C'est un peu nigaud, dirait Renaud.

    Mais pourquoi l'oiseau

    N'aimerait-il pas

    Le ciel où s'envoler ?

     

    J'aime ton amour…

    C'est un peu simpliste, me dit Baptiste,

    Mais pourquoi le ver

    Tout fragile et tout nu

    N'aimerait-il pas sa terre ?

     

     

    MERCREDI 10 NOVEMBRE 2010, A 12:07
    CE SOIR
     

     

     

    Ce soir, j'ose t'aimer :

    En moi, un feu doré a remplacé la braise dormante,

    Et les tièdes rameaux de ma raison desséchée,

    Je les laisserai se consumer à ton amour.

     

    Ce soir, j'ose t'aimer,

    Ou bien plutôt me l'avouer.

    Et je crois qu'avec mon amour,

    Les malades aux lèvres pâles se dressent de leur lit,

    Je crois qu'avec mon amour,

    Les visages au regard triste

    Trouveront le sourire et la joie.

     

    A mon propre bonheur, je réchauffe les mal-vêtus,

    J'abreuve les assoiffés,

    Les affamés, je les nourris.

    A mon propre amour,

    Tout se lève avec résolution

    Et s'apprête à marcher et rire.

    Les aveugles dessinent,

    Les sourds écoutent la voix du rossignol.

    Ce soir, j'ose t'aimer.

     

    Ce soir,

    Je prends sur moi toutes les misères des peuples ;

    Je les regarde avec douceur et tendresse,

    A la flamme de mon amour éveillé,

    Je les transforme en étoiles vivantes,

    En espoir, en confiance, en amitié,

    Puisque je lance dans l'univers

    Un peu plus d'amour partagé.

     

    Ce soir, j'aime l'humanité.

     

     

     

     

     

     

    MARDI 09 NOVEMBRE 2010, A 13:33
    DES TOUT PETITS SOUS
     

     

     

     

    Pour deux sous de soleil de tes yeux dorés,

    Pour deux sous de soleil de tes yeux mordorés,

                        Donne-moi…

     

    Pour trois sous de rivière de ton rire si franc,

    Pour trois sous de cascade de ton rire d'enfant,

     

    Ajoute un sou du fleuve d'eau de ton sourire,

    Ajoute aussi  la chaleur de ton bras,

                        Et donne-moi…

     

    Un sou de ton pas ferme  de rocher et de terre ,

    Plus un euro de la surface plane où nage ton espoir,

     

    Et  encore une pièce  pour la flèche directe

    De ton regard si droit.

     

                         Pour tous ces sous,

                         Pour tous ces sous,

     

    Charge-toi

                       

                         De mon visage

                          Et de mon âme…

     

     

    MARDI 09 NOVEMBRE 2010, A 10:14
    LE VENT D'AUTOMNE
     

     

     

     

     

    Peu importe ce que pense le vent

    Qui s'échappe en criant des horizons poudrés,

    Peu importe sa rage, sa vague mugissante

    Et sa fureur annoncée,

    Si mes cheveux dansent,

    Et glissent sans s'emmêler,

    Si mon front goutte l'air purifié de froidure,

    Si mes épaules rejetées

    M'appellent à respirer,

    Peu importe ce que le vent rumine,

    Ce qu'il gronde entre ses lèvres rageuses,

    Peu importe qu'il ricane

    Et se moque de ma fragilité,

    Peu importe qu'il se vante de m'avoir fait pleurer !

    Mon corps s'emplit de rire

    Et mon esprit se lave

    Sous la violente rafale

    Qui peut me faire tomber

    Mais transforme mon jardin d'automne

    En  un camp du Drap d'or.

     

     

     

    LUNDI 08 NOVEMBRE 2010, A 11:04
    QUELQUES FEUILLES MORTES
     

     

     J'étais seule au monde,

    Orpheline et veuve de tout bonheur.

    Je rêvais de toi sans te connaître,

    Sans prononcer ton nom.

     

    Un après-midi d'août, accablée,

    Je t'ai rencontré sur un premier sentier…

    L'ombre des feuilles était noire,

    Noires étaient mes pensées.

     

    L'eau du lac doucement clapotait,

    Doucement nos voix s'écoutaient,

    Et l'on entendait bruire les feuilles

    Des peupliers affolés par le vent.

     

    Tu étais seul au monde,

    Seul et orphelin de tout bonheur,

    Ton visage était grave et soucieux,

    Tendu par une vie fermée.

     

    Je t'ai parlé quand tu m'as regardée,

    Et tu m'as écoutée quand je t'ai parlé.

    Chaque jour de cette fin d'été,

    Nous avons bu autant d'eau que d'espérance.

     

    J'ai gardé tes paroles graves ou frivoles,

    J'ai gardé l'eau qui jaillissait de tes lèvres,

    J'ai gardé tes épaules qui se relevaient,

    Tes jambes dépliées, ta marche vers moi.

     

    La nuit, j'ai rêvé de ton image

    Tendre au-dessus de mon visage.

    J'ai mis ton nom sur mes lèvres ouvertes,

    Je te parlais quand nous étions séparés.

     

    Je n'étais plus ni veuve, ni orpheline,

    J'ai pu écrire, boire et dormir,

    J'ai accepté mon avenir,

    Le regarder sans m'affoler…

     

    J'ai mis dans mes pas titubants

    Ton pas, ta marche verticale.

    Tu as posé dans ma main

    Ton cœur et ta main.

     

    J'ai mis dans mon regard

    Tes paupières fermées de tendresse,

    Tu m'as parlé d'amour et de fête,

    J'ai essuyé tes pleurs et j'ai reçu ta joie.

     

    Et ton oreille a retenu mes secrets

    Comme le coquillage retient le bruit des vagues.

    Tu m'as sauvée de l'oubli

    Et tu t'es mis à chanter…

     

     

     

    *

     

     

     

     

     

     

     

     

    VENDREDI 05 NOVEMBRE 2010, A 22:35
    LA PRINCESSE ET LE RENARD
     

     

     

    Si tu veux m'aimer,

    Jamais plus, plus jamais,

    Tu ne dormiras tranquille

    Si tu ne sais où je suis,

    Et plus jamais, jamais plus

    Je ne dormirai tranquille

    Si je te sais au loin,

    Sur la route,

    Si je te sais malade,

    Si je te sais chagriné…

     

    Jamais, jamais plus,

    Si tu veux bien m'aimer,

    Je ne pourrai me passer de ta parole,

    Ni de tes bras autour de ma taille,

    Ni de la bonté de ton regard,

    Et si je veux t'aimer,

    Jamais plus tu ne pourras oublier

    La caresse de ma main,

    Mon sourire à toi seul donné,

    Mon abandon dans tes bras…

     

    Et si tu veux de cet amour,

    Jamais plus, jamais plus je ne veux

    Attendre et attendre encore,

    Je veux que ta flamme m'éblouisse,

    Brûle mon propre désir,

    Et si je t'aime, et si tu m'aimes,

    Je te ferai oublier le ciel gris et la terre fangeuse,

    J'effacerai tes cicatrices 

    Je te ferai accepter le passé.

    Je ne te donnerai pas l'oubli,

    Et tu ne me donneras pas l'oubli,

    Mais la force de comprendre et de pardonner…

     

     

    Jamais, plus jamais,

    Tu ne pourras songer

    Paisiblement, quotidiennement,

    Sans que la pensée de notre amour

    Remue en toi des vagues et des vagues

    De tendresse et d'inquiétude,

    Sans que la pensée de ta vie,

    Sans que la pensée de ta survie,

    Soient liées à la pensée de ma vie,

    Soient liées à la pensée de ma survie…

     

    Et plus jamais je n'entendrai

    Le son ordinaire de ta voix,

    Car cette voix sortira de l'ordinaire

    Pour devenir un signe, un appel, un secret,

    Et le son de ma voix

    Pour toi sera signe, appel, confidence.

    Et les silences entre nous seront paroles,

    Et les silences s'enrichiront au lieu de se détruire,

    Et les silences deviendront complicité et paix…

     

    Et si tu veux m'aimer,

    Jamais plus, jamais plus,

    Mon grand lit ne me paraîtra confortable et douillet,

    Et jamais plus,

    Si je sais bien t'aimer,

    Ton lit ne te paraîtra refuge douillet. 

    Ton bras me manquera,

    Mon bras te manquera,

    Et toute la place vide sera ruelle glacée,

    Et la nuit sera froide, longue et cruelle…

     

    Eh bien, nous le savons,

    Le renard pleurera

    Quand le Petit Prince disparaîtra.

    Et si tu veux m'aimer,

    Des jours et des jours de lumière,

    Et si tu veux m'aimer,

    Des nuits et des années lumières,

    Un jour, nous pleurerons,

     

    Toi, ou moi,

    Parce que les blés dorés

    Seront couchés par le vent,

    Parce que les roses offertes

    Un jour seront fanées,

    Parce que l'océan tout-à-coup

    Pour l'un de nous sera tempête,

    Parce que l'air sera devenu lourd

    Sous les orages d'un été…

     

    Mais la vie sera belle encore quelques années,

    Et riche, et puissante, et créative.

    Il y aura la genèse à inventer,

    Il y aura le soir et le matin,

    Il y aura le lundi et le dimanche,

    Et le calendrier rempli,

    Les amis de passage,

    La fête et les  rires,

    Les pleurs à essuyer ensemble,

    Et les enfants à promener.

     

    Les mots prononcés seront entendus,

    Les regards auront un sens,

    Les projets verront leur dénouement,

    Les vacances s'appelleront découvertes,

    Les voyages s'appelleront rencontres.

    Alors la vie reprendra sa vraie place,

    Si tu veux m'aimer,

    Si je veux t'aimer,

    Si nous nous aimons tous deux…

     

     

     

     

     

     

    VENDREDI 05 NOVEMBRE 2010, A 08:33
    VERS UN NOUVEAU CHEMIN
     

     

     

    Mes mains se sont vidées,

    Mon corps n'est plus habité.

    Un désert jaune et caillouteux

    Me blesse à chaque pas.

    Tantôt un soleil dur et cruel

    Me brûle les paupières

    Et vrille mon cerveau,

    Tantôt une pluie raide et tranchante

    Liquéfie mes pensées,

    Détrempe peau, os et muscles,

    Et fait plier mon dos qui se courbe

    Et me lance à genoux,

    En une prière muette et effarée…

     

    Et pourtant, dans mes artères

    Où circule avec lenteur

    Un sang transparent

    Comme une sève de rosier,

    Un petit germe s'est glissé.

    En mes veines bleutées

    Coule un sang porteur d'une autre vie,

    Et c'est comme un trésor caché

    Qui tinte doucement,

    Une mélodie légère et frémissante

    Posée quelque part en mon corps,

    Chantant tout doucement

    Comme le ferait une mère

    Pour son enfant malade,

    Chantant tout doucement

    Pour éteindre ses pleurs,

    Chantant tout doucement

    De peur qu'on l'entende chanter,

    Chantant tout doucement

    Pour m'insuffler la vie…

     

    Je porte en moi ce trésor caché,

    Qui porte peut-être le nom : attente,

    Qui porte sans doute le nom : confiance,

    Qui porte enfin le nom : espoir.

    Je relève la tête

    Et j'accomplis ces gestes extraordinaires :

    Ouvrir mes mains, sourire, parler, écrire.

    Avec  timidité mais pleine d'espérance,

    Je regarde les jours à venir.

    Le soleil dorera ma peau au lieu de la brûler,

    La pluie m'abreuvera au lieu de me noyer,

    Je marcherai bien droite

    Sur un nouveau sentier,

    Je trouverai dans la forêt tutélaire

    Un plus large chemin,

    Où les arbres solides

    M'envelopperont de leur ombre légère…

     

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    MARDI 26 OCTOBRE 2010, A 12:27
    FLORE
     

     

    L'iris

     

      Sur ses robes violines ont grimpé trois chenilles jaunes.

     

    La pensée

     

      Elle boude et fait la moue, engoncée dans ses velours.

     

    L'œillet

     

      Franges en bouquets.

     

    Le lys martagon

     

      Les joues enflées, il soigne sa rubéole.

     

    La tulipe

     

    Buvez à ma santé !

     

    L'ancolie

     

      Un essaim de papillons embrassés.

     

    Le lupin

     

      Eteignez donc ces cierges !

     

    Le liseron

     

      Farandole de danseuses en tutu rose et blanc.

     

    Le chèvre-feuille

     

      Tiens, de gros moustiques blancs !

     

    La giroflée

     

      Jolie, mais rouillée, dommage !

     

    L'hortensia

     

      Un chou-fleur très coquet.

     

    La sauge

     

      Elle est sortie du feu de l'enfer.

     

    Le muguet

     

      De petites dents de lait.

     

    Le pois de senteur

     

    Les jeunes moniales ont accroché leurs petites coiffes au portemanteau.

     

    Le callas

     

      L'orchestre de saxophones, très digne.

     

    L'anémone

     

    Une grosse araignée au cœur d'un berceau.

     

     

    Le bleuet

     

    Dans sa bouche, dix langues bleues de serpent.

     

    Le nénuphar

     

      Les confettis sont tombés dans l'étang.

     

    Le dahlia pompon

     

      Il y a beaucoup de poufs à papillons, par ici !

     

    Le glaïeul

     

      En garde, toutes ces épées vertes !

     

    Le diélytra, cœur de Marie

     

      Secoué de sanglots, de son cœur tombent des larmes roses.

     

    Le tritoma

     

      Eteignoir tout rouge de la flamme qu'il veut éteindre.

     

    Le pétunia

     

      Quel estomac doit-il toujours gaver, avec ses grands entonnoirs ?

     

    Le cyclamen

     

      C'est la coiffe retroussée d'une Hollandaise aux joues bien roses.

     

    La nivéole

     

      C'est ici qu'on fabrique les balles de ping-pong.

     

    Le gouet

     

      Il se croit dans une église, près du maître-autel, bien sûr !

     

    La soldanelle

     

      Petit soldat casqué, c'est encore ton tour de garde !

     

    La ficaire

     

      Maladie de foie ?

     

    Le lotier corniculé

     

      Bébé dragon à gueule rouge.

     

    La linaigrette

     

      Un bec, un plumetis : c'est un oiseau tout petit.

     

    Les iris le long du fossé

     

      Voilà le couvent de bonnes sœurs !

     

    Le lis tigrinum

     

      Dans un jardin vert, il y a une vasque rose d'où s'échappe en jet d'eau une fontaine d'étamines.

     

    La rose

     

      « Je suis la plus belle, la pus belle, la plus belle ! Ah, je me meurs ! »

     

    Le bouton d'or

     

      Pour dire la messe, son calice pur.

     

    La campanule

     

      Et pour sonner matines, ses clochettes.

     

    Le myosotis

     

      Il entend tous les secrets de la terre, avec ses petites  oreilles de souris.

     

    La pâquerette

     

      Bébé joufflu, avec son  bonnet autour de ses joues rondes.

     

    Le lin

     

     «  Je vous assure que je vais me trouver mal ! »

     

    Le tussilage

     

      -Allez, du balai !

     

    L'ancolie

     

      Elle a des ailes d'hirondelle.

     

    L'edelweiss

     

      Un peu trop poudré , ce masque vénitien.

     

    La tulipe

     

      Turban coloré d'un élégant cheik arabe.

     

    Le dahlia

     

      Quelle tignasse ! Jamais un peigne dans ses cheveux !

     

    La violette

     

    Lèvres retroussées, elle dit avec dédain : ma chère !

     

    L'orchidée des prairies

     

      Les petits clowns font leur cirque !

     

    Le séneçon

     

      « Je deviens vieux, quelle barbe ! »

     

    Le pissenlit

     

      Quel tour de force, attraper un nuage !

     

    Le serpolet

     

      C'est la chenille qui redémarre…

     

    La gentiane lutea

     

      Que feras-tu de ton panier d'étoiles ?

     

    La gueule de loup

     

      Miam !

     

    Le pissenlit

     

      Pauvre dragon qui ne fait même pas peur, et surtout pas aux petits enfants !Pourtant, ça lui arrive à lui aussi de cracher un peu de fumée !

     

     

     

      Terminé pour ce matin, à toi de jouer maintenant !

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    SAMEDI 23 OCTOBRE 2010, A 15:46
    TROP, C'EST TROP!
     

     

    A trop vouloir prévoir,

    N'a pas su voyager.

    A trop vouloir diriger,

    N'a pas su divaguer.

    A trop vouloir étudier,

    N'a pas su s'étonner.

    A trop vouloir parler,

    N'a pas su écouter.

    A trop vouloir chanter,

    N'a jamais pu pleurer.

    A trop vouloir aimer,

    N'a pas su se donner.

    A trop vouloir, n'est-ce pas !

     

     

    DIMANCHE 17 OCTOBRE 2010, A 21:05
    LE GRAND DÉPART
     

     

    Et dans la chambre pâle,

    Dolente, elle est couchée :

    Blanches mains et blanc visage.

    Au creux du lit,

    Volent les âges.

     

    Sans bruit, elle s'en va,

    A petits pas.

    Au creux du lit, sa vie s'envole,

    Car dans la chambre pâle,

    Souffrante, elle est couchée.

     

    Son regard est blotti

    Au feston de ses cils :

    Parle-moi, parle-nous,

    Dis-moi, dis-moi, dis –nous

    Une dernière fois.

     

    Au creux du lit,

    Sa voix s'étiole,

    Sa vie s'en va, mais sans parole.

    Sa vie s'en va. Elle s'envole

    Comme l'oiseau apeuré.

     

    Voir le soleil, encore un peu,

    Voir les jonquilles,

    Et sentir les premières violettes…

    Mais dans la chambre pâle,

    Malade, elle est couchée.

     

    Des vapeurs de douleur

    Font ondoyer le lit.

    Chacun entre et se tait, sourit,

    Et pleure, et sort timidement.

    Au creux du lit vole sa vie.

     

    Même en plein jour,

    C'est la peur de la grande nuit.

    Ne brillent ni étoile, ni lumière,

    Car dans la chambre pâle,

    Mourante, elle est couchée.

     

    Ici, c'est la pâleur du lit

    Où s'endormiront bientôt

    Tous ses méchants soucis.

    Les fioles et les seringues

    Elle n'en a plus besoin.

     

    Dans la chambre attristée

    On vient la regarder :

    On caresse sa main,

    On essuie une larme,

    On lui dit : à demain !

     

     

     

     

    DIMANCHE 17 OCTOBRE 2010, A 14:09
    NOTRE PÈRE
     

     

     

     

     

    L'enfant

     

    Notre Père qui es aux cieux

         

          Dans les nuages, je vois parfois des lapins,

          Mais Toi, je ne t'ai jamais vu ; j'aimerais bien !

     

     

    Donne-nous aujourd'hui notre pain

     

         Mais donne-moi  d'abord quelques bonbons,

         Des rouges, surtout !

         Je ferai peur à ma mamie,

         Je lui dirai que j'ai mal au cœur !

     

     

    Comme nous pardonnons aussi,

    A ceux qui nous ont offensés.

     

     

        Je veux bien pardonner à Maxence,

        Mais je lui dirai pas !

        Et je lui ferai un croche-patte à la récré,

        Juste pour rigoler !

     

     

    Mais délivre-nous du mal

     

         ça me fait mal,

         Que je tombe tout le temps de vélo !

         Fais-moi grandir un peu plus vite,

         Que je fasse des dérapages un peu bien,        

         Comme mon grand frère !

     

         Amen !

     

     

    L'ado

     

    Que ton règne vienne

     

         Le règne de Dieu, ce serait chouette !

         Tout le monde il est gentil,

         Même pas en rêve,

         ça serait méga barbant !

     

     

    Que ta volonté soit faite

        

         Un coup de gueule ou un coup de poing,

         ça  règle pas grand'chose,

         ça  détend quand même,

         Et on sait qui respecter !

     

         Amen !

     

     

    Le philosophe

     

    Mais délivre-nous du mal

     

         Le mal, le bien, qu'est-ce ?

         Eros, Méphisto, le Veau d'Or ?

         Une époque ? Un lieu ? Une culture ?

         « L'homme n'est ni ange ni bête… »

         Qui décide ? Qui choisit ?

         Détermination ? Hasard ?

        

         Amen !

     

     

    La rebelle

     

    Que ta volonté soit faite sur la terre

     

         Moi, on ne me commande pas !

         Fais-ci, fais-ça !

         Le premier patron qui me parle sur ce ton,

         Je le jette !

         Et si c'est comme avec le paternel dans le temps,

         Autant lui dire tout de suite,

         À votre petit Jésus :

         Moi, je suis libre,

         Je fais exactement ce qui me plaît,

         Et la volonté de Dieu, hein,

         Qui la connaît ?

         C'est peut-être que je sois libre !

         T'as quelque chose à dire à ça ?

     

         Amen !

     

     

    La mère

     

    Donne-nous  notre pain de ce jour

     

         Donne-moi du bois sec

         De la farine de manioc et de l'eau

         Pour cuire mes galettes.

         Donne-moi un fruit mûr

         Pour en verser le jus

         Dans le gosier desséché de mon enfant.

         Donne au potager de mon petit enclos

         Un peu de pluie,

         Et quelques bouses sèches,

         Afin qu'à la nouvelle lune

         Mon petit n'ait plus ce ventre tendu !

        

         Amen !

     

     

     

    Le vieux

     

    Notre père qui es aux cieux

     

         Accepteras-tu que je t'y rejoigne ?

         Je suis si fatigué, usé jusqu'au désespoir…

         La vie est trop longue quand elle n'a plus de sel…

     

     

    Que ton nom soit sanctifié

     

         C'est vrai, je jurais un peu autrefois,

         J'avais le sang chaud, je m'énervais pour rien !

         Mais ça, je n'ai jamais blasphémé, tu peux me croire !   

         Ou bien, j'ai oublié…

     

     

    Que ta volonté soit faite

         Si  ta volonté, c'est de me faire clamser

          Après la Marie,

          Faut que tu réfléchisses un peu :

         Tu me vois avec une étrangère qui me dirait :

         « Allons, Pépé, faut te changer ! »

         En m'ôtant le cigare des lèvres ?

     

     

    Pardonne-nous nos offenses

     

         Bon, j'offense plus grand'monde depuis cinq ans !

         Tout'façon, je vois quasiment personne,

         Même les enfants, y me laissent seul,

         Et quand ils viennent, ils causent à leur mère.

         Moi, je compte pour du beurre,

         Tout ça depuis ma trachéo !

         On m'emmène pas plus faire les commissions,

         Ça serait pourtant une bonne sortie !

     

     

    Et ne nous soumets pas à la tentation

        

         Pas de danger, mais j'aimerais bien !

         La dernière tentation,

         C'est le tabac, le sel, le sucre,

         Et un peu de gnole, aussi !

         On me cache même les bouteilles entamées !

         Chienne de vie, c'est pas une vie !

         Tous pareils, des chiens pour un chien !

         Mon Dieu, donne-moi un peu de tentation

         Une dernière fois,

         Que je me sente encore vivant !

        

         Amen !

     

     

        

      

     

     

            

     

     

     

     

    SAMEDI 16 OCTOBRE 2010, A 17:47
    AUBE EN BOURGOGNE
     

     

     

    Jamais le ciel ne fut

    Si pâle.

     

    J'entends les hulottes blotties

    Qui gémissent sous les broussailles.

     

    Jamais le ciel ne fut

    Si rose.

     

    L étang éveillé

     Palpite sous des reflets mauves.

     

    Jamais la pierre des maisons ne fut

    Si blanche.

     

    La poussière de l'aube fait grincer

    La lanterne éteinte sous le portail.

     

    Jamais l'horizon ne fut

    Aussi joyeux.

     

    Les vignes  vendangées dorment

     Dans une brume rousse.

     

    Jamais la terre ne fut

    Aussi enivrante.

     

    Mon sommeil a glissé sur la nuit.

     Sur la forêt pèse une brume lourde :

     

     

    Et ce matin d'octobre,

    J'ai trouvé par ma fenêtre ouverte

     

    Le coassement moqueur d'un rayon de soleil,

    Au rire trompeur

     

     Pour me faire croire

    Au retour de l'été.

     

     

     

    MARDI 05 OCTOBRE 2010, A 11:21
    QUEL MOIS POUR UNE NOUVELLE ANNÉE?
     

     

       

     

    L'année commence en septembre

    Avec la trousse des écoliers,

    Les listes au judo, au caté,

    Les billes, les cartes à échanger.

     

    L'année commence en octobre

    Avec les vignes vendangées,

    L'espoir d'un jus coloré et fruité

    Qui réjouira les fins gosiers.

     

    L'année commence en décembre

    Avec l'avalanche de cadeaux,

    Le sapin dressé dans un seau

    Et les maisons illuminées.

     

    L'année commence en janvier :

    On prend de bonnes résolutions,

    On en fera des collections

    Qui resteront sur le papier.

     

    L'année commence en février :

    Enfin les skis et les descentes !

    Il faut chercher les meilleures pentes

    Et s'épuiser sans se casser !

     

    L'année commence au mois de mars

    Quand les crocus montrent leur nez.

    On voit s'ouvrir les camélias,

    Il faut tailler les hortensias.

     

    L'année commence au mois d'avril :

    Ne te découvre pas d'un fil.

    Tombe la pluie encore glacée,

    L'hiver bientôt sera passé.

     

    En mai naissent les petites filles

    Dans les jardins remplis de roses.

    Les fleurs blanchissent les coteaux,

    Le vent frémit sur le hameau.

     

    En juin bûchent les étudiants

    Qui se condamnent au dernier bagne :

    Les révisions sont très austères,

    Les résultats sont un mystère !

     

    L'année s'élance vers juillet

    Quand on a pris le sac à dos :

    On enjambe toutes les clôtures,

    Pour de fabuleuses aventures…

     

    En août, on marche les pieds nus

    A la rencontre d'inconnus.

    Les parasols peuplent la plage,

    Dans le lointain gronde l'orage.

     

    Le premier jour est un sentier

    Eclairé par trente bougies :

    Une à une, elles guident nos vies

    Et nous font traverser l'année…

     

     

     

     

     

     

     


    LUNDI 04 OCTOBRE 2010, A 11:32
    AOÛT IMPLACABLE
     

     

    Le mois d'août est un tissu léger

    Qui danse autour de mes jambes

    Et des teintes rosées sur mon cou dénudé.

     

    Comme des paupières fermées sur des yeux fatigués,

    Les magasins ont tiré les rideaux,

    Et dans les rues désertes roulent quelques vélos.

     

    On a bouclé toutes les persiennes :

    Plus de voisins et plus de pain :

    Même les oiseaux désertent mon jardin.

     

    La pelouse désespérée a jauni,

    Le ruisseau est tari au creux du vallon.

    Dans le pré communal ont fleuri les chardons.

     

    Le soleil grille muscles et pensées

    Et mon corps indolent cherche la méridienne

    Pour rêvasser à l'ombre des pommiers.

     

    Le sommeil filtre derrière mes yeux

    Des images embrumées de plage ou de montagne :

    Août sans vacances me déracine et m'écrase…

     

    Pour partir, il faut attendre encore un peu

    Dans l'ennui et l'abrutissement

    De journées saturées de siestes et de mouches piqueuses.

     


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  •  

    MARDI 28 SEPTEMBRE 2010, A 12:10
    JUILLET
     

     

    Si l'on me demandait,

    Si l'on me demandait,

    Je dirais que c'était loin d'ici,

    Si l'on me demandait…

     

    Que c'était en juillet,

    Si l'on me demandait,

    Qu'il faisait assez sombre

    Et qu'il faisait frisquet…

     

    Que l'air était léger,

    Que nous avions marché.

    C'était un bel été,

    Si l'on me demandait…

     

    Et nous avions parlé,

    Et nous avions chanté,

    Sur des sentiers pentus,

    Si l'on me demandait…

     

    Sur une herbe séchée

    Nous avions bien parlé,

    Et la nuit s'étira sans que passent les heures,

    Si l'on me demandait…

     

    Que des étoiles folles

    Dans le ciel éclataient,

    Qu'une cloche au village,

    Dans un lointain sonnait…

     

    Et qu'il m'a dit trois mots

    Ecoutés en tremblant,

    Trois mots pour une éternité,

    Si l'on me demandait…

     

    Mais j'ai demandé trop,

    Si l'on me demandait,

    Car je croyais alors

    A la force des mots…

     

     

    MARDI 28 SEPTEMBRE 2010, A 11:26
    JUIN
     

     

    Et voici ma préférée,

    Ma fluette, ma fragile,

    Celle qui ne tient pas dans un vase d'eau fraîche,

    Celle qui ne tient pas dans mes cheveux,

    Celle qui rampe, et court,

    Et envahit prés et chemins.

    Comme je t'aime, mon joyeux bouton d'or,

    Malicieux trolle des prairies,

    Né des étoiles en fleurs

    Ou de la lune tombée sur mon jardin.

     

     

    LUNDI 20 SEPTEMBRE 2010, A 09:22
    LE MOIS DE MAI
     

     

    Et l'angélus au loin se répand au jardin,

    Notes fêlées et cassées par le vent ;

    Splendeur du temps qui coule

    Et qui s'égoutte et que j'écoute

    Au cœur de mon jardin.

     

    En mai, épanouie de joie verte

    Et de bonheur en fleur, je vis

    Sous le soleil léger,

    Sous le vent,

    Sous la pluie,

    Je regarde et j'admire

    Les pétales fragiles qui s'ouvrent

    En rêvant de lumière.

     

    O douces, les mousses vertes

    Sur les pierres disjointes,

    Et glissants les pavés miroitant sous la pluie.

     

    La glycine me donne, mauve et violine,

    L'aquarelle pastelle et parfaite à mes yeux ;

    Et la giroflée d'or, et de fête, et de feu

    D'odeurs lourdes et captives

    Appelle les bourdons consciencieux.

     

    O, mon pommier fleuri de promesses rosées,

    Léger de fleurs, pesant bientôt de fruits,

    Tu es l'arbre biblique.

     

    Je prie  en regardant, seule, de mes yeux souriant,

    Un jardin de printemps éclairé de sépales

    Et de duvet mousseux, et d'ailes pépiantes,

    O, mon petit jardin ouvert sous le ciel clair,

    De rosée le matin, source perlée de vie.

     

    Je t'admire en silence, mes yeux d'enfant ouverts,

    Les mains fermées pour mieux prier la terre

    Et rendre grâce de ce bonheur donné.

     

    En mai, je suis silence,

    Je suis espoir, liberté, envol, lumière ;

    Chante avec moi la vie dans mon jardin fleuri,

    Chante l'amour,

    O, mon Dieu créateur

    D'herbe et de pâquerette !

     

     

     

     

     

    LUNDI 20 SEPTEMBRE 2010, A 08:48
    AVRIL
     

     

     « Soldanelle, petit soldat aux jambes grêles,

    Que gardes-tu sous ton casque violet ?

     

    - Je surveille les névés de l'Oisans

    Qui pleurent sous les soleils d'avril.

     

    - Bientôt gagneront la mer

    Où voguent les bateaux blancs. »

     

     

     

    LUNDI 20 SEPTEMBRE 2010, A 08:31
    MARS: LE SAULE
     

     

    Et voici l'espérance :c'est un bâton aride,

    Une branche bien raide sur l'arbre racorni :

    Pas de sève, pas de sang.

     

    Mais sur le rameau brun, un duvet de poussin

    Qui crève une coquille verte :

    C'est le chaton de saule dont le bourron explose,

    C'est l'espérance verte annonçant le printemps,

    C'est joie de ma rivière

    Qui s'en va fredonnant.

     

     

    LUNDI 20 SEPTEMBRE 2010, A 08:03
    FÉVRIER : CENDRES
     

     

     

     

    La mort triomphe

    Et l'Esprit a soufflé ;

    Passe, passera…

     

    Sous la terre lassée

    Ton corps flétri disparaîtra ;

    Passe, passera…

     

    C'est l'âme qui s'envole

    Quand le corps a sombré ;

    Passe, passera…

     

    Cendres, tu es poussière,

    Cendres, tu es lumière,

    Cendres, tu es diamant…

     

    Passe, passera ta vie,

    Ici-bas, passe, passera,

    La dernière ou la première,

     

    Passe, passera,

    Et ton âme,

    Et ton âme restera…

     

     

    VENDREDI 17 SEPTEMBRE 2010, A 15:20
    JANVIER
     

     

    La route toujours me semble longue

    Pour attendre demain

    Et surtout l'an prochain…

    Blanche est ma route,

     Long le chemin.

     

    La vie s'allonge toujours trop loin

    Pour voir grandir l'enfant

    Ou d'ennui, périr chaque matin.

    Longue est la route,

    Blanc le chemin.

     

    Mon cri s'échappe avec la nuit

    Dans mes rêves sans trêve

    Et mes éveils chagrins.

    Les heures s'égrènent à petits pas :

    Vide ma vie, vide ma main…

     

     

    VENDREDI 17 SEPTEMBRE 2010, A 15:04
    DÉCEMBRE
     

     

    Ils ont fait un bon gueuleton,

    Et moi, et moi, et moi ?

    Soir de Noël pour la bâfrée,

    Sans moi, sans moi, sans moi.

     

    Pour s'empiffrer ont préparé salmigondis ,

    Dindes farcies et bûches grasses,

    Pour la bamboche vins de pays ,

    Et moi, et moi, et moi ?

     

    Minuit venu, un vieux bonhomme,

    Robe rouge et barbe blanche,

    A présenté cent-vingt cadeaux enrubannés :

    Mais rien pour moi, mais rien pour moi.

     

    « Les anges dans nos campagnes »

    Pas plus ne furent conviés,

    Leurs ailes douces ne purent se déployer :

     On festoya sans célébrer.

     

    Misérable, je suis resté derrière les portes nues,

    Ils s'amusaient, ils s'embrassaient sans m'inviter :

    Personne n'a ouvert en criant à voix forte :

    « Mais, entrez donc, petit Jésus ! »

     

    Et toi, et toi, et toi ?

     

     

     

     

     

     

     

     

    JEUDI 09 SEPTEMBRE 2010, A 10:37
    NOVEMBRE: LA TOUSSAINT
     

     

    Et chacun aujourd'hui de penser au passé :

    Nos morts, nos pauvres morts ont aussi leur journée.

    On fête le cimetière en jaune et violacé,

    Les chrysanthèmes pleurent  et la grille a grincé.

     

    Pour qui ces tombes blanches et ces croix astiquées ?

    Le marbre est doux quand la douleur est forte

    Et triste l'est plus encore la tombe abandonnée

    Et la croix qui se penche avant de s'enterrer.

     

    Les dates bien gravées s'enfilent en chapelets

    Psalmodiés par des hommes debout

    Pour des hommes couchés :

    Dure est la pierre et dure la souvenance.

     

    Mon corps vient au secours de mon chagrin

    Sur le tombeau impitoyable où je polis le grès,

    Emue de me savoir mortelle et d'être apprivoisée

    Par les monstres rieurs qui gisent sous mes pieds.

     

     

    LUNDI 06 SEPTEMBRE 2010, A 20:12
    OCTOBRE
     

     

    L'automne une fois encore

    Me précipite vers l'infinie tristesse

    Des jours abandonnés.

    Je guette, affligée,

    La dernière feuille jaune

    Où souffle un peu de vie,

    Accrochée comme un pendu de cire

    Sur mon poirier replié pour l'hiver.

     

     


    LUNDI 06 SEPTEMBRE 2010, A 20:04
    SEPTEMBRE
     

     

    Garde-toi d'être triste :

    L'automne ne fait que commencer.

    Que feras-tu au cœur de l'hiver

    Quand tes arbres te feront peur ?

     

    Je me brûlerai dans la ville,

    Sur les néons, sur les vitrines ;

    J'embrasserai le béton

    Mais la forêt guettera mon retour.

     


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  •  

    MARDI 31 AOÛT 2010, A 11:34
    VILLAGE DES CAUSSES
     

     

    Dormez, gens de ce petit village,

    Depuis midi, les volets sont fermés.

    Dormez, gens du pays d'ici,

    Du haut des tours cassées, les siècles ont défilé.

     

    Près de l'église brune, le ruisseau toujours las

    Grignote lentement une berge lassée,

    Et l'arche du vieux pont berce une algue lascive

    Et l'on entend sonner au loin le monastère.

     

    Des dentelles de pierre, des dents de tissu fin,

    Des parures de soie, des bonnets tuyautés

    Et de clairs brodequins pour des pieds de poupée :

    La marquise est partie, demeure son parfum.

     

    Dormez, gens de cette vallée,

    Le ciel toujours est gris sans vos chansons légères.

    Les minuits se succèdent sur les toits fatigués,

    Et dans vos tombes blanches,

     

    Dormez sans vous soucier…

     

     

    DIMANCHE 29 AOÛT 2010, A 10:10
    BOUQUET DE FLEURS
     

     

    Un bouquet de fleurs,

    Quoi de plus éphémère ?

    Un bouquet de fleurs,

    Quelques jours de bonheur ?

     

    Le plus beau des bouquets,

    Fut le  premier reçu,

    Le plus joli cadeau

    D'un monsieur généreux.

     

    Plus tard, bien plus tard,

    D'amoureux pleins d'attention,

    J'ai reçu  de très coûteuses roses,

    Mais pas autant d'émotion.

     

    Il n'y a pas deux jours,

    Il n'y a pas deux mois,

    Il n'y a pas dix ans,

    Mais bien plus de trente ans.

     

     

    J'étais jeune et morose :

    Je pensais le matin

    Qu'il y aurait encore

    Sur mon petit jardin

     

    De fines  poudres blanches

    Déposées par l'usine,

    Et des fruits avortés

    Sur l'abricotier nain.

     

    Juste en été le chaud,

    Et tout l'hiver la bise,

    Tant de poussières grises

    Annulant les saisons.

     

     

    Pas un souffle d'air pur

    Qu' on puisse respirer,

    Pas une fleur ouverte

    Qu'on puisse regarder.

     

    Mais dans la chambre nue,

    Dans la chambre sordide

    Où j'alignais les vers,

    Me prenant pour Musset,

     

    Un miracle d'amour, de beauté,

    De fraîcheur,

    Un bouquet de printemps,

    Fleurs éphémères jamais oubliées :

     

    Trois branches de lilas blanc

    Et trois tulipes roses,

    Et un parfum léger

    Transformant toute chose :

     

    Bouquet de pauvre,

    Mais bouquet de prince,

    Offert par mon père chômeur

    Pas vu depuis deux ans.

     

    Si les fleurs ont fané,

    En moi sont restées  belles,

    Et mon père décédé

    Est encore bien vivant.

     

    Pas cent roses écarlates,

    Juste un simple bouquet,

    Trois fleurs de lilas blanc

    Et  trois tulipes roses,

     

    Un bouquet éternel,

    Magnifique et puissant,

    Merveille de l'amour

    Imprimé pour toujours.

     

    Trois fleurs de lilas blanc

    Et trois tulipes roses,

    Un très joli bouquet

    Donné par mon  papa.

     

     

     

     

    MARDI 24 AOÛT 2010, A 09:20
    MATIN SUR LA MARAIS POITEVIN
     

     

    D'une main boueuse, l'étang brasse la vase

    Et murmure dans les berges broussailleuses.

    Sort de la nuit sa bouche molle de terres gorgée,

    Argile aux lourdes ombres, aux paupières bleuies.

     

    Entends crier la hulotte roussie,

    Monstre alarmé de son propre cri :

    Il file ses ailes pesantes en claquant du papier

    Pour se cacher dans les peupliers gris.

     

    Livide et frêle, un bouleau blanc sort de la nuit,

    Et gémit la hulotte  éblouie de lumière.

    Le guéret tout-à-coup se baigne de couleurs

    Et l'on entend au loin un chien dans un fourré.

     

    Le marais palpite en éveillant l'oiseau,

    C'est un héron cendré au regard de violence :

    Vois, de la plume au bec, il guette le soleil

    Pour dévorer ses proies.

       

     

     

     

     

    MARDI 24 AOÛT 2010, A 08:24
    LA MEIJE
     

     

    Si haute, si blanche,

    Si lointaine,

    La Meije m'appelle par mon prénom,

    Et j'entends la voix d'une amie.

     

    Si blanche, si froide,

    Si altière,

    La Meije attire mon regard et mon pas,

    Et je rejoins une amie.

     

    Là se rejoignent mes rêves,

    Là s'engloutissent mes peines,

    Là se créent mes prières,

    Là, j'embrasse l'univers.

     

    Je peux boire à en être désaltérée,

    Je peux manger à en être rassasiée,

    Je peux penser sans une ombre d'angoisse,

    Je pourrais y dormir  à en être reposée.

     

    C'est ici qu'il me faudrait mourir,

    Mais c'est ici que j'ai envie de vivre.

    Loi de mon corps fatigué de la marche,

    Loi de mon esprit qui se nourrit de beauté.

     

    Ici, je peux respirer

    Ou cesser de respirer,

    Ici, je peux venir avec des amis

    Ou affronter seule l'Oisans tout entier.

     

    Cette marche longue et fastidieuse

    Pour mes jambes inexpertes

    Me donne fatigue et bonheur,

    Me donne des forces vives et joyeuses.

     

    Mon visage ne se bute plus

    Aux immeubles agressifs,

    Mon oreille ne siffle plus

    Au passage des motards pressés.

     

    Mon visage ne se bute plus

    Aux vitres d'une fausse vie,

    Avec ses murs et ses donjons,

    Ses meurtrières et ses oubliettes sombres.

     

    Je gobe l'air léger

    Comme le carpillon gobe la mouche,

    Comme le papillon, j'étends mes ailes,

    Et je suis sûre d'être éternelle.

     

     

    LUNDI 02 AOÛT 2010, A 11:20
    MÉLI-MÉLO
     

     

     

    Car, dans ma tête en saladier

    On a décidé de mêler les idées :

    En moi, le doux et le sucré,

    L'amer hiver et puis le bel été.

     

    Une cohorte d'idées me ronge

    Et je cherche où les placer :

    La droite tourne à mes côtés,

    La gauche est encore mal logée.

     

    Dans mon esprit confus

    Tout me semble illusion.

    Les mots s'échappent de mon masque

    Et s'envolent vers l'insane horizon.

     

    Des aggraves et des anathèmes

    J'en ai prononcé plein,

    Mais j'aimerais me reposer

    Sur des idées melliflues.

     

    Avec les rides viendront la bonté,

    La sagesse et l'espoir :

    Je ne voudrais pas vieillir

    Sans embrasser l'humanité.

     

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    SAMEDI 31 JUILLET 2010, A 20:37
    REGARDS
     

     

    C'est pour moi un homme,

    La bouche grasse, le pied tordu,

    Et l'œil vairon, et la peau grise,

    La main trapue, l'oreille lapine,

    Les ongles noirs, le dos bossu.

    Et c'est aussi une femme,

    Trop grosse, trop maigre, usée,

    Trop ceci, et pas assez cela.

    Devant moi se casse un Picasso

    Que mon esprit retors piétine d'adjectifs

    Péjoratifs, toujours, sous mon regard mauvais.

     

    Qu'attends-tu, Seigneur,

    Pour rassembler le puzzle

    Et me présenter l'homme aimé de Dieu,

    Dont le pied marche,

    Dont l'œil regarde,

    Dont la main créée,

    Où l'esprit souffle, comme il soufflerait en moi

    Si mes yeux n'étaient pas scellés

    Par les préjugés, par l'indifférence,

    Par la bêtise, l'ironie,

    La haine tapageuse et stupide ?

     

    Arlequin de triste comédie,

    Je dois poser mon habit coloré :

    Mettre l'habit de lumière, la robe du baptisé.

    Les yeux alors ouverts sur la vérité de l'homme,

    Je le verrai, fils bien-aimé de Dieu,

    Source de mes paroles attentives,

    Source de mes pensées bienveillantes,

    Création divine née de l'amour et de l'universalité

    Dont je suis une, petite, petite,

    Mais pour l'éternité.

     

     

     

     

     

     

    MARDI 27 JUILLET 2010, A 16:38
    MEA CULPA, MEA MAXIMA CULPA
     

     

     

     

    Donc, Seigneur, tu veux aussi mon pardon.

    Mon pardon que je ne peux pas donner,

    Qui me ronge et m'empoisonne

    Et me jette dehors dans le froid, dans la nuit.

    Il faudrait donc, Seigneur, que j'efface et oublie

    Ma cicatrice tiède et mon sang affolé ?

    La paix viendra en moi quand j'aurai fait la place

    A des sourires argentés,

    Mais, habitée de haine, je me tiens mieux debout.

    A toi, Seigneur, tant de fois, j'ai crié :

    Ne me garde pas rigueur,

    Je ne suis qu'un enfant troublé !

     

    Aujourd'hui, je supplie ta force apaisante

    Pour que je donne, pour que j'accorde mon pardon :

    Qui le veuille le prenne.

    En moi doit jaillir une eau bien plus légère,

    Une eau qui chante et nourrisse mon âme,

    Pauvre âme tâchée de souvenirs haineux,

    De regrets vils, de pensées tortueuses,

    Pauvre âme abîmée d'angoisse

    Qui ne dit plus son nom

     Et se cache sous des douleurs fugaces,

    De migraines, de nausées,

    Du  mal de mal aimer.

     

    Une année passera bientôt, et de l'automne rousse

    Eclateront les lumières dorées :

    Fais qu'à cette heure-là, mon pardon soit donné.

     

     

     

     

    DIMANCHE 25 JUILLET 2010, A 20:58
    LES CADEAUX
     

     

    J'ai un cadeau pour toi,

    Me dit la vague,

    Juste un petit embrun salé

    Pour y perdre ta larme.

     

    J'ai un cadeau pour toi,

    Me dit le vent,

    Juste une légère brise

    Pour rafraîchir ton front.

     

    J'ai un cadeau pour toi,

    Me dit l'orage,

    Juste un boucan du diable

    Qui cachera ton cri.

     

    J'ai un cadeau pour toi,

    Me dit la pluie,

    Juste une goutte pure

    Pour y laver  ta peine.

     

    J'ai un cadeau pour toi,

    M'a dit le petit bois,

    Quelques arbres géants

    Pour perdre ta boussole inutile .

     

     

    DIMANCHE 25 JUILLET 2010, A 20:35
    UN QUOTIDIEN BIEN TRISTE
     

     

    Je suis debout dès le matin

    Malgré mon désir de sommeil ;

     

    Je me jette sur des livres vains

    Malgré mon désir d'écrire ;

     

    Je mange sans avoir faim,

    Je bois sans désir d'ivresse.

     

    Et quand je me glisse entre mes draps rêches,

    Je n'espère ni dormir, ni rêver,

     

    Mais seulement plonger dans un abîme sombre

    D'où le soleil me tirera le lendemain.

     

     

     

    VENDREDI 16 JUILLET 2010, A 10:31
    VILLAGE PERDU D'AUVERGNE
     

     

    Descendant des montagnes,

    Le cœur léger  et les chaussures crottées,

    Pendant des heures et des heures,

    Je vis s'ouvrir de proche en proche

    Au débouché de forêts closes

    Et de gothiques sentiers

    Des toits plombés sombrant sur le hameau.

     

    Dormez village gris, village de grisaille,

    Village grillagé,

    Vos portes sont fermées,

    Vos volets sont pincés.

     

    J'ai longé, solitaire et déçue

    Les maisons en enfilade raide,

    Les maisons aux lèvres serrées,

    Aux serrures bandées :

    Dormez, village gris, village de grisaille,

    Village grillagé.

     

    Au gris des murs,

    Des allées de platanes rapides et serrés

    Vers l'escalier de pierre

    D'un château endormi :

    Les pelouses sont lavées,

    Les fleurs interdites.

    Désolantes certitudes qu'on ne pourrait entrer.

     

    Si vieilles étaient les barrières,

    Si vieilles étaient les clôtures,

    Et si vieux les vieux murs,

    Construits pour une éternité,

    Que j'ai pu lire en ce village

    Aux  paupières froncées :

    Ici, défense d'entrer.

     

    Au bout du village tout gris,

    J'ai longé tant de noires bergeries,

    Tant de noires laiteries :

    Pas de foin, pas de fontaine,

    Juste une route étroite pour marcher,

    Assoiffée de paroles

    Et de contact humain.

     

    Passez, passez, passez,

    Dans ce village gris, il n'y a pas de halte,

    Pas de visage, pas de main,

    Village de grillage, village grillagé,

    Village impénétrable où je suis étranger,

    Je voudrais bien entrer.

     

     

    JEUDI 15 JUILLET 2010, A 21:29
    LA VEUVE
     

     

    Il faut jeter ces vieux diapos,

    Tout ce fouillis, toutes ces photos,

    Et tu ne peux tout de même pas garder

    Ces vieux dessins, ces vieux papiers !

     

    Elle a des enfants si gentils,

    Ils s'occupent bien de sa vie…

     

    T'as les lunettes de grand-papa ?

    C'est pas possible, ce bazar-là !

    On s'y mettra avec Sarah,

    On va très vite trier tout ça !

     

    Ses enfants sont très gentils,

    Toujours présents dans sa vie…

     

    Ces bouquins lus et relus

    Faudra aussi  les mettre au rebut !

    Et ces boutons pleins les tiroirs,

    Pourquoi en faire tout une histoire ?

     

    Ces livres-ci sont mes amis

    Je ne les lis plus, je les caresse :

    Ils m'apportent la tendresse

    Dans leurs pages encore tapie.

     

    Comme ses enfants sont gentils !

    Ils s' intéressent à sa vie…

     

    Cette jupe-là est trop usée,

    Ce chemisier est démodé !

    Ce long veston est à papa :

    Pourquoi donc garder tout ça ?

     

    Dans cette jupe abîmée et ces bottes,

    Je suis partie en mai pour accoucher.

    Dans ce veston usé à redingote

    Papa m'a demandé de l'épouser…

     

    Ces pyjamas font carnaval :

    Gardes-en un pour l'hôpital ;

    Ces escarpins ne te vont pas :

    Tu devrais mettre des souliers plats.

     

    Ces pyjamas me tiennent au chaud

    Quand je regarde les infos.

    Je sais marcher avec des talons

    Et sans boiter, et sans bâton !

     

    Ses enfants sont si gentils !

    Ils l'aident à ranger son fourbi…

     

    Il faut trier, il faut jeter,

    Il faut enfin tout nettoyer :

    Les armoires pleines, les tiroirs bondés

    De tous ces trucs dépareillés !

     

    Ce bouton peint d'un paysage,

    Ces vieux tricots pas terminés,

    Ce ruban vert, cette dentelle défraîchie

    Sont les pages de ma vie…

     

    Ses enfants sont très présents :

    Tant d'attention, c'est émouvant !

     

    Maman, tu n'es pas raisonnable :

    La maison est bien  trop grande,

    Et tu n'es plus du tout capable

    De l'entretien : il vaut mieux vendre !

     

    Prends donc un appart plus petit,

    Et pourquoi pas, change de quartier !

    Tu as ici trop d'escaliers,

    Sur le parquet, tu peux glisser…

     

    Un grand deux pièces, c'est suffisant,

    Avec balcon, évidemment :

    Tu pourras mettre quelques pensées,

    Une petite table pour déjeuner…

     

    Ses enfants sont si gentils,

    Ils sont attentifs à sa vie…

     

    On te demande de réfléchir,

    Et pour cela, tu as tout le temps :

    Pense aux années qui vont venir,

    On ne s'ra pas toujours présents…

     

    J'ai cru ma vie terminée

    Mais j'ai des projets pleins la tête :

    Je passe des heures sur internet,

    Je vais m'inscrire à l'université !

     

    N'oublie pas, maman, ta santé est fragile :

    Tu n'es plus ni forte, ni agile :

    Bien sûr, tu as encore de bons moments

    Quand on t'invite au restaurant !

     

    Mon logis est mon cocon

    Qui me protège de ses grands bras :

    J'aime les cris dans ma maison,

    J'aime y entendre du brouhaha.

     

    Mes enfants sont trop gentils

    Mais je veux diriger ma vie…

     

     

     

     

    MARDI 13 JUILLET 2010, A 12:09
    FASCINATION
     

     

    Je la vois,

    Je la vois continuellement,

    Je la vois toujours,

    Car j'ai failli être fasciné par elle.

    Vous la connaissez sûrement aussi :

    Elle a des yeux très clairs,

    Des yeux sans fond,

    Des yeux très pâles, très bleus.

    Et son visage est blanc et rose,

    Et son visage a bel ovale.

    Elle a des yeux très clairs

    Et j'ai failli être fasciné par elle.

     

    Et ses mains sont toutes fines,

    Ses doigts sont longs et souples.

    Comme j'aime ses petits ongles nacrés !

    Je les vois,

    Je les vois continuellement,

    Je les vois toujours.

    Elle a,

    Elle a de longs cheveux soyeux,

    Tout en douceur,

    Tout en blondeur.

    Elle a de longs cheveux soyeux

    Et des perles à ses oreilles.

     

    Et son  visage est blanc, est rose,

    Et son visage a bel ovale.

    Elle a, elle a aussi,

    De fines jambes, et des épaules

    Bien tendrement,

    Bien chaudement rondes.

    Elle a des doigts très souples

    Et j'ai failli être fasciné

    Par sa peau et son teint très clairs.

    Et j'ai failli être fasciné par elle.

    Elle a de longs cheveux soyeux,

    Tout en douceur, tout en blondeur.

     

    Elle a de longs cheveux soyeux

    Et des perles à ses oreilles.

    Ses robes sont très belles,

    Bien coupées, bien lavées, bien repassées.

    Ses chaussures me ravissent aussi, oui, aussi.

    Je les vois,

    Je les vois continuellement,

    Je les vois toujours.

    Et ses mains sont toutes souples,

    Ses doigts sont longs et fins.

    Qu'elle est jolie,

    Qu'elle est jolie !

     

    Mais son regard est perdu,

    Et ses cheveux soyeux inutiles ;

    De ses mains, elle ne saurait que faire :

    Elle ne sait que les regarder,

    Elle ne sait que parader,

    Elle ne sait que se faire adorer,

    Se faire aduler…

    Jamais, jamais elle n'a aimé,

    Et j'ai failli être fasciné par elle.

    Sa fadeur, qui me l'a dit ?

    Mes rochers, mes montagnes,

    Mes herbes et mes fleurs…

     

    Elle, elle est juste jolie,

    Elle est jolie sans mes paroles,

    Elle a juste à se regarder…

    Comme j'aime ses petits ongles nacrés,

    Et sa douceur, et sa blondeur !

    Et son visage blanc et rose,

    Et son regard un peu perdu !

    Elle n'a jamais connu,

    En robe claire, en short délavé,

    La montée des rochers,

    Elle n'a jamais glissé sur le talus du torrent,

    Sautant, riant, chantant !

     

    Elle a de longs cheveux soyeux,

    Elle est si bien coiffée,

    Le vent du large,

    Le vent violent, pirouettant, le vent hurlant,

    Le connaît-elle ?

    Et sa caresse, et son sable brûlant les yeux ?

    Qu'elle est jolie,

    Qu'elle est jolie !

    De ses jambes galbées, elle ne saurait que faire :

    Elle ne sait que les regarder…

    La voici sur son canapé :

    Elle rêve, elle dort : un ange !

     

    Un ange rose, et bleu, et pâle,

    Un ange endormi sur son charme.

    Comme j'aime son parfum de fleurs légères !

    Comme j'aimerais respirer son haleine !

    Mais le gel de la nuit à la belle étoile

    Qui jamais ne l'a mordue ?

    Mais la rosée de l'aube

    Qui jamais ne l'a réveillée ?

    Elle dort sur son canapé, inanimée.

    Elle a de longs cheveux soyeux,

    Des lèvres colorées,

    Et j'ai failli être fasciné par elle.

     

    Elle a de grands cils noirs,

    Mais les cils verts du lac,

    Mais les franges des pins ?

    Elle se regarde, ou bien, elle dort, inanimée ! 

    Et son visage blanc et rose,

    Et son regard un peu perdu ?

    Elle n'a jamais connu,

    En short usé, en souliers plats,

    La montée des rochers,

    Les neiges de l'été.

    Elle a de grands cils noirs,

    Et ses cheveux sont tout dorés.

     

    Elle se regarde, si jolie,

    Mais l'amitié des cordées,

    Mais les premiers névés ?

    Elle n'a jamais eu froid en plein été,

    Elle n'a jamais glissé sur les pierriers,

    Et j'ai failli être fasciné par elle…

    Et le poids de son corps sur la mousse des montagnes,

    L'a-t-elle jamais sue, cette joie de sombrer ?

    Elle est dans un lit blanc, un lit douillet,

    Un matelas très doux l'écoute,

    Et j'ai failli être fasciné par elle,

    Et j'ai failli l'adorer !

     

    Elle a des lèvres colorées,

    Mais la couleur des épilobes,

    Mais le courage des soldanelles ?

    Sa propre voix, je la connais,

    Elle est plainte à mon oreille

    Habituée aux répons des coucous.

    Mais elle est si jolie,

    Et ses yeux sont si clairs !

    J'ai bien failli être fasciné par elle…

    Mais moi, je marche sous les étoiles,

    Et j'engloutis ainsi

    Tous les nuages qui embrument ma vie…

     

    Oui, je suis fasciné aussi

    Par l'air des prés,

    Par l'air des monts,

    Par les buées, par les rosées,

    Les chemins et les sables,

    Les déserts , les  forêts et les fleuves,,

    Et le soleil, et les gelées.

    Me voici tel, et tel il faut m'aimer !

    Elle est très belle,

    Et j'ai failli être fasciné par elle,

    Mais toujours, toujours,

    Elle dort…

     

     

     

     

    LUNDI 12 JUILLET 2010, A 23:18
    GRIFFES D'UNE ÂME DOUCE
     

     

    Dans le petit matin

    Mon âme, mignonnette,

    Dans le petit matin,

    Mon âme s'est levée.

     

    Mon âme grise s'est levée,

    Dans le petit jardin,

    Mon âme , mignonnette,

    Mon âme grise s'est levée.

     

    Mon âme grise s'est lavée

    Au soleil, mon âme,

    Au soleil, doucette,

    Mon âme s'est lavée.

     

    Dans la fraîcheur du jour,

    Frimousse, frimousette,

    Dans la fraîcheur du jour,

    Mon âme a espéré.

     

    Elle a couru bien vite

    Grisette, la civette,

    Elle a couru bien vite,

    Mon âme dans la rosée.

     

    Et dans le pré mouillé,

    Mon âme chatte-reine,

    Et dans le pré mouillé,

    La minette a chassé.

     

    A vu la libellule,

    Mon âme chatte-belle

    A vu la libellule,

    Mon âme l'a croquée.

     

    A vu le mulot gris,

    Mon âme douce et rousse,

    A vu le mulot gris,

    La chatte l'a griffé.

     

    Les toiles d'araignée,

    Caline, calinette,

    Les toiles d'araignée,

    Bien tôt les eut froissées.

     

    A vu la feuille sèche,

    Mon âme ronronnette,

    A vu la feuille sèche,

    Mon âme l'a brisée.

     

    A vu le nénuphar,

    Nage, mon âme, nage,

    A vu le nénuphar,

    Mon âme s'est noyée.

     

     

    VENDREDI 09 JUILLET 2010, A 17:04
    LA GARRIGUE EN CORSE
     

     

    Connais-tu la Corse ?

    Mer ? Montagne ? Soleil ?

    Ile de beauté ?

     

    La bien-aimée s'extasie à la lumière

    Et fait chanter les cigales.

     

    Moi, je te parle de garrigue.

     

    Garrigues à germandrées poilues,

    Garrigues tomillares dominées par le thym,

    Garrigues d'immortelles

    Accrochées aux cailloutis brûlants :

    Je chante votre courage.

     

    J'ai marché sur les calcaires

    Où pend la thymélée hirsute

    Des garrigues à passerine.

     

    Je me suis tordu les pieds

    Dans les garrigues à genévrier,

    Ouvertes sur les parfums d'Orient.

     

    Ecoute, écoute la voix des garrigues à euphorbes

    Tapies en coussinets épais :

    Tu entendras la mer en fête.

     

    Oui, je parle de garrigues,

    Et des senteurs ivres de soleil

    Ensorcellent mes cheveux tordus par la vague

    Et séchés par le vent.

     

    Je me fais sirène- oiseau pour plonger

    Dans la vague mousseuse

    Ou mon corps se libère,

     

    Et je m'envole sur les pentes chaudes et cuivrées

    Ou vit la marjolaine,

    Fredonnant la chanson.

     

    Mes pieds ne sont pas sûrs

    Dans les sentiers de hasard,

    Et j'accroche mes jambes nues

    Aux piques acérées des végétations folles.

     

    Feuilles sorcières qui brûlent et lacèrent la main,

    Fausses fleurs préparées dès l'automne,

    Plantes succulentes aux noms évocateurs :

    Perce-pierre sur les côtes,

    Nombril de Vénus agrippé aux vieux murs.

     

    Plantes voyageuses, enracinées dans la chaleur d'été :

    Figuier venant de Barbarie, agave d'Amérique,

    Figue marine du sud africain,

     

    Je vous suis dans vos périgées hasardeux,

    Je vous envie vos racines libérées,

    Vos promenades sur les airs et les vents.

     

    Les garrigues sont des prodiges de la vie,

    Des prodiges d'astuce, de malice et de courage,

    Des prodiges qu'il faudrait aduler.

     

    Prodiges de l'imagination de cette flore

    Et de ses feuilles en écailles,

    Ses feuilles en aiguilles,

    Ses très petites feuilles,

    Ses feuilles coriaces,

    Ses feuilles persistantes,

    Ses plantes ligneuses,

    Ses plantes aqueuses,

    Les arbustes épineux,

    Les coussins de verdure,

     

    Tous, toutes ont trouvé le bon salut,

    La voix royale, l'éternité de la reproduction

    Pour faire face à la chaleur de l'été.

     

    Homme, ne brûle plus,

    Homme, ne construis plus,

    Homme, oublie l'homme.

     

    Admire, oui, admire avec moi les garrigues,

    Les garrigues courageuses, inventives, fragiles,

    Et pleure quand elles sont ravagées.

     

    Regarde une fois encore

    Les immortelles jamais fanées,

    Les liserons volubiles,

     

    Les arbouses fades,

    Les bruyères de cinq mètres

    Et les myrtes bibliques.

     

    J'étouffe de bonheur et de chaleur

    Dans ces garrigues de lumière et de feu,

    Et j'aperçois au loin la mer

    Ouverte sur le golfe de Valinco

    Où j'ai passé mes jours d'été.

     

     

     

    VENDREDI 09 JUILLET 2010, A 16:08
    MONUMENT AUX MORTS D'UN VILLAGE BRETON
     

     

    Il y a dans le jardin

    Un p'tit landau charmant,

    Des brassières vont séchant

    Su'fil à linge branlant.

     

    Eliaz n'est pas au loin,

    Il est mort à Verdun.

               ------

     

    Dans le jardin mouillé

    Un p'tit vélo rouillé.

    Dans le jardin chantant,

    Un p'tit camion d'fer blanc.

     

    Yves est parti un biau matin,

    Mais pour mourir à Verdun.

                ----------

     

    Il y a dans le jardin

    Un arrosoir d'enfant.

    Il y a dans le lavoir

    Un petit canard blanc.

     

    Merlin n's'ra pas marin,

    L'est ben mort à Verdun.

         ------------

     

    Il y a dans le boudoir

    Un bureau d'écolier,

    Une plume a séché

    Dans l'encrier cassé.

     

    Brizh plus jamais n'écrira,

    Brizh est mort au combat.

           -------------

     

    Il y a dans le jardin

    Un grand fauteuil d'osier,

    Un canotier percé

    Tombé dans les rosiers.

     

    Brieuc n'est pas marié,

    S'est juste fiancé.

              ----------

     

    Il y a au cimetière

    Cent mille cris de colère.

    Des fronts pour les démons,

    Du sang pour la nation.

     

    Des noms et des prénoms

    Pour une génération.

          -----------------

     

    Sur la place du village

    Un monument gravé :

    Cent noms qu'on a jetés

    A la postérité.

     

    N'ont eu que leur enfance,

    Sont tous morts pour la France.

     

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