• Les réveils nocturnes des petits

    Qui nous dessinaient au matin des yeux de hiboux,

    Les biberons au lever du jour,

    Les fesses à nettoyer, et le nez, et les oreilles,

    Les soins permanents dont les bébés sont friands,

    C’étaient des moments de bonheur,

    Mais nous ne le savions pas…

     

    Les rendez-vous avec le toubib, la maîtresse,

    L’orthophoniste, le dentiste,

    Les cours de flûte ou de piano,

    Les gymnases aux courants d’air glacé

     Où l’on applaudissait les exploits des enfants,

    C’étaient des moments de bonheur,

    Mais nous ne le savions pas…

     

    Les repas bruyants autour d’une table trop petite,

    Les rires stupides de l’ado,

    Les gloussements hystériques devant une chanteuse débraillée,

    Les blagues cent fois entendues

    Et les infos qu’on ne pouvait jamais écouter,

    C’étaient des moments de bonheur,

    Mais nous ne le savions pas…

     

    Les portes qui claquaient,

    Les veilles inquiètes du samedi soir,

    Les vêtements jonchant le sol des chambres

    Et les amis infréquentables qu’on accueillait pourtant,

    C’étaient des moments de bonheur

    Nous ne le savions pas…

     

    Les visites quotidiennes chez la grand-mère fragile,

    Les courses pour remplir son frigo,

    Ses papiers à trier, à jeter, à traiter en urgence,

    Les promenades à petits pas cassés

    Alors que tout,

    Tout restait à faire dans la maison dévastée ,

    C’étaient des moments de bonheur,

    Mais nous ne le savions pas…

     

    Le vent qui passe au-dessus de nous

    A lavé fatigues et petites misères,

    Reste le souvenir de bonheurs perdus

    Qui chante doucement dans nos mémoires…  


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  •  

    Ayant posé de multiples questions,

    Si l’on me donne des réponses insolites,

    Des réponses curieuses,

    Des réponses qui ne me conviennent pas,

    Des réponses dont je ne veux pas,

    J’en serais fort contrariée,

    Mais qu’arrivera-t-il

    Si je n’ai plus de questions ?

     

    Si l’on m’oppose des vérités blâmables,

    Des vérités discutables

    Qui pour moi sont mensonges,

    Tromperies, erreurs,

    J’en serais fort contrariée,

    Mais qu’arrivera-t-il

    Si je ne reçois plus

    Les vérités venues d’ailleurs ?

     

    Si l’on rejette le chemin que j’ai choisi,

    Celui dans lequel mes pas me conduisent avec fidélité,

    Avec constance, avec  ténacité,

    Si l’on veut prendre ma main

    Et forcer mon destin

    Pour me conduire sur un autre chemin,

    J’en serais fort contrariée,

    Mais qu’arrivera-t-il

    Si plus personne ne prend ma main ?

     

    Si ma maison est envahie

    Avec des rires, des chansons, du bruit,

    Avec des disputes et des cris,

    Et des montagnes de vaisselle à laver,

    Et des piles de linge à repasser,

    J’en serais fort contrariée,

    Mais qu’arriverait-il

    Si ma maison restait silencieuse,

    Si les volets de l’amitié restaient fermés,

    Si ma porte plus jamais ne s’ouvrait ? 


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  • Tu ne le sais pas,

    Tu ne le sais pas encore

    Car tu es trop petite,

     

    Tes yeux s’ouvrent tout grand

    Sur les publicités brillantes

    Qui te vrillent le tympan,

     

    Tes yeux s’ouvrent tout grand

    En cochant dans les catalogues rutilants

    Les jouets rêvés, la poupée page trois,

    Et la page sept, et la douze, et, et…

     

    Tes yeux s’ouvrent tout grand

    Devant les vitrines décorées

    Où dansent en une joyeuse gigue

    Les peluches animées d’un savant mécanisme.

     

    Non, je ne vais pas t’offrir la tablette tactile,

    Ni le dernier CD convoité,

    Ni les horribles poupées au teint blême

    Qui ressemblent aux sorcières de Salem.

     

    Tu ouvriras quelques paquets enrubannés

    Choisis avec amour et discernement,

    Et je sais bien que tu trépigneras de joie et de surprise

    Devant des cadeaux inattendus mais aussitôt adoptés.

     

    Mais, tu ne le sais pas,

    Tu ne le sais pas car tu es trop petite,

    Les plus beaux cadeaux que tu recevras

    Comme à chacun de tes Noëls,

    Ce sont les souvenirs

    D’une famille heureuse d’être ensemble

    Pour une trêve de vie au milieu de l’hiver,

     

    Les fous-rires avec tes cousins

    Réunis à la table des enfants,

    Vos courses folles le lendemain dans le jardin mouillé,

    Les bâtons, les ficelles

    Qui prolongent les bras,

    Les cartons et les boîtes

    Qui se transforment en trains,

    En maisons, en cachettes, en châteaux,

    Et vos goûters en haut du cerisier

    D’où vous dominez le quartier, et donc,

    Le monde étalé sous vos pieds !

     

    Mes plus beaux cadeaux,

    Ce sont ces souvenirs heureux que je tricote pour toi,

    Comme une écharpe qui te tiendra au chaud

    Quand les jours froids seront là.

     

    Tu es trop petite, et tu ne le sais pas,

    Mes plus beaux cadeaux,

    Ce sont ces moments forts qui resteront en toi.

     

    Comme une chanson douce

    Qui s’échappe d’une flûte sortie de son fourreau,

    Quand tu seras une jeune fille aux yeux attristés de langueur,

    Une maman débordée et fatiguée d’une double journée,

    Une vieille dame chagrinée par la solitude,

    Tu sortiras ces jours heureux de ta mémoire,

    Et tu souriras tendrement

    Au souvenir de ces Noëls d’antan.

     

     

     

      


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  • Emergeant de magasins tumultueux

    Où ma pensée se rabougrissait,

    Abrutie de bruits assourdissants et de vitrines agressives,

    J’ai réclamé le silence absolu des campagnes isolées,

    J’ai réclamé comme un verre d’eau limpide

    La paix des taillis et des prés endormis.

     

    Je suis partie de ma ville affolée

    Vers des sentes boueuses.

    J’ai cherché l’oubli des préparatifs de fêtes

    En marchant d’un pas lourd dans un monde figé.

     

    Mon corps a retrouvé un regain d’énergie,

    Mon esprit a trouvé une unité nouvelle,

    Par de petits bonjours, des sourires échangés,

    N’ayant plus à se perdre par de vains bavardages.

     

    La nuit m’a dénichée sur une étroite route

    Où mon pas s’est offert le jour qui se levait.

     

    Au milieu des heures froides

    Et des doutes étranges mais toujours probables,

    J’ai mesuré la longueur de mon pas,

    La longueur du chemin

    Qui s’étendait jusqu’à Noël.

     

    Je suis rentrée chez moi,

    J’ai allumé la deuxième bougie de l’avent

    Dont la flamme oscillait au souffle de l’âtre,

    Et je me suis endormie

    Dans la paix de mon humanité retrouvée. 

     

     

     

     

      


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  • Tu étais si petit,

    Tu n’aimais pas marcher.

    On mettait tes souliers,

    En te laissant chigner.

    On te prenait la main,

    Tu courais en trottant

     Sur tes jambes potelées.

    Pour aller où ?

    Là où tu ne voulais pas aller.

     

    Et puis, tu as grandi

    Et ton pas s’est fendu

    De grandes enjambées.

    Grosses bottes en hiver,

    Vernis noirs pour le soir,

    Tu chaussais tes souliers

    D’une main assurée,

    Choisissant ton chemin

    Et parcourant ta vie.

    Pour aller où ?

    Là où tu voulais aller.

     

    Les journées ont passé,

    Les mois et les années.

    D’un doigt maigre et tremblant,

    Tu montres tes chaussons.

    On enfile des chaussures

    A tes pieds déformés,

    Des chaussures à la lourde semelle crêpée.

    On te prend par le bras,

    Et tu traînes ton pas

    Là où l’on te conduit : où ? Où ?

    Là où tu ne veux pas. 


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